Après avoir déposé ses affaires dans sa chambre, Arthur s'était forcé à ressortir dans le couloir. Pas que ça lui faisait plaisir, mais il aurait eut l'air malin si il ne connaissait absolument rien à l'organisation du bâtiment. Il avait arpenté les couloirs au hasard, ignorant sa conscience qui lui hurlait que c'était stupide de se perdre dans un endroit avec des gens non humains capable de vous arracher la gorge d'un simple mouvement du pouce, ou même d'humains qui s'amusent à vous maltraiter comme un chien errant. Il se trouva dans un couloir vide, qui devait servir pour les cours. Affichés sur les portes, des écriteaux indiquaient le numéro de la salle et son utilité. Au fond du couloir, il y avait une salle réservée aux arts.

Sa curiosité fut plus forte que sa prudence, et il entrouvrit la porte. Le spectacle qui s'offrit à lui fut tellement époustouflant qu'il entra dans la pièce et oublia de refermer la porte derrière lui. Dans tous les coins, des peintures à moitié terminées séchaient, et des toiles vides attendaient qu'on les peignent. Des tâches de peinture ornaient les tables en bois, creusés de petits trous. La pièce était grande, mais le bazar artistique qui s'y trouvait lui donnait un air d'atelier accueillant dans lequel il se sentit bien. Le plus impressionnant était sans doute la grande fresque qui ornait tout un mur de la salle. C'était un véritable festival de couleurs, qui semblaient représenter des milliers de choses différentes sans aucun rapport les unes entre les autres. Mais la façon dont elles cohabitaient dans l'œuvre semblait parfaitement normale et éblouissait la vue.

Dans son ébahissement, Arthur ne se rendit même pas compte de la présence de quelqu'un d'autre, caché dans l'ombre. Il souriait à la fresque, le regard rêveur, sans se rendre compte de quoi que ce soit, debout au centre de la pièce.

Une fois l'effet de surprise passée, il soupira et détourna les yeux de la peinture pour chercher d'autres éléments intéressants dans la pièce. Son regard se posa sur un autre, qu'on pouvait qualifier de tout ce qu'il y a de plus jaune. Il crut d'abord à une autre toile, peinte avec un talent remarquable, jusqu'à ce qu'il l'entende: cette respiration qui venait de cette même peinture.

Il fit un bond en arrière, hurlant sans pouvoir se contrôler, le cœur battant la chamade. Il remarqua une fourrure plus noire que la nuit éclairée par un petit rayon de soleil. Il y avait un FAUVE dans la salle ! Ayant cessé de crier, il tomba à genoux, bégayant des adieux sans queue ni tête, fixant de ses yeux exorbités par la peur le félin qui n'avait pas bougé. Pas une seule seconde il ne pensa à s'enfuir, se voyant déjà mort lacéré par d'énormes griffes. Il ferma les yeux, et, dents serrées, attendit.

Les secondes durant lesquelles la bête s'approcha de lui furent les plus longues de toute sa vie, les dents tellement serrées qu'il crut un moment que ses mâchoires ne tiendraient pas. Il n'ouvrit ses yeux que lorsque, à son plus grand étonnement, il entendit une voix bien trop proche de lui à son goût avec un accent d'ailleurs:

"Chut, je vais pas te manger."

A ces mots il ouvrit brusquement les yeux, le coeur toujours affolé, et trouva devant lui une magnifique chinoise aux yeux d'un vert kaki clair tirant sur le jaune. C'est ce qui mit Arthur sur la piste.

"Tu étais la grosse bête ?" furent ses mots, et il se sentit légèrement stupide en les prononçant.

Il compris l'état dans lequel il venait de se montrer et se sentit gêné. Comme à son habitude, ça l'énerva, et il commença à rouspéter.

"Mais t'es con ou quoi ?! Il faut être stupide pour se changer en un monstre si gros et terrifiant et de se cacher dans un coin sombre ! Comment voulais-tu que je devine que tu ne me voulais pas de mal ?! Même les gens non-humains sont barges alors ? Ah bah ça c'est une déception ! Et puis, y'a pas idée d'observer les gens de cette..."

Il remarqua alors que les mains de la jeune asiatique était posées sur le dessus de son crâne. Ses yeux s'écarquillèrent et il se tut, l'air profondément blessé. Sans un mot de plus, il se releva et fit quelques pas pour s'éloigner d'elle.

"Je suis désolé, je n'aurais pas dû entrer ici, c'est sûrement interdit. Je vais y aller avant de faire plus de tapage."

Il tourna son visage vers la porte qui était restée entrouverte.

Arthur s'approcha de la porte et s'apprêta à sortir de la pièce avec mauvaise humeur quand... il comprit deux choses. L'une, c'est que, marchant au hasard, il ne savait pas par où aller. Il se dit que ce n'était pas bien grave, puisque partout serait plus agréable qu'ici. Mais, de deux, il n'avait pas envie de repartir après qu'on lui ait parlé de cette manière. Peu lui importait qu'elle se transforme en tigre de 400 kg et qu'elle lui mâchouille le bras: ça ne suffisait pas pour le motiver à "fuir". Il ferma la porte, se retourna, bien stable comme près à attaquer, et lui tira la langue audacieusement. Puis il ajouta:

"Malgré ce que tu essayes de me dire, je me considère comme bien loin de la manière dont tu me décris. Je ne suis pas si irréfléchi, mais être face à un si gros animal, avec des dents et des griffes et qui m'observe comme si j'étais sa nourriture, forcément, me met dans une position de danger imminent ! Et c'est parfaitement normal !". Il jeta un regard mauvais à son dos et poursuivit:

"Et ça ne t'est pas venue à l'idée qu'un fauve de cette envergure est effrayant ?! Il faut être un monstre également, pour ne pas y avoir pensé !! Et après, c'est moi qui ait besoin de réfléchir à la situation avant de faire quoi que ce soit ? Laisse-moi rire !"

Il fit quelques pas vers elle, s'attendant à des représailles à tout moment. En y réfléchissant, il se demanda s'il n'était pas suicidaire. Cette pensée le fit sourire dans sa colère.

Arthur l'affronta du regard, de plus en plus en colère. Il était conscient d'avoir dépassé le stade du raisonnable et il s'en fichait bien, et le calme froid et méprisant de la chinoise ne fit qu'accentuer son énervement.

"Ha ! Tu ne peux pas savoir à quel point tes mots me dégoûtent tellement chacune de tes paroles te contredisent ! Tu dis me mettre dans le même sac que les autres juste après avoir dit de ne pas juger par les apparences ! Et tu m'accuses, en plus, d'avoir mal réagi ? Comme si c'était ma faute d'avoir eu... Peur ! Et je ne pense pas qu'on puisse me reprocher autre chose !"

Ses yeux brillaient de colère et d'une certaine tristesse. Il ajouta, en baissant légèrement sa voix toujours aussi colérique:

"Je n'ai pas horreur des panthères, et j'adore les chats, mais n'importe quel animal de cette envergure et ayant cette mâchoire et ce regard dangereux m'aurait effrayé. Et cesses de me regarder aussi calmement ! Tu es quoi, à la fin ? Pouvoir se transformer en cette énorme bestiole... Ce n'est pas normal ! Est-ce que c'est courant, ici, de croiser des gens effrayants à chaque coin de rue ?! Ou es-tu un cas à part ? Pourquoi faire ce genre de choses... Tu as pris peur ? Peur de quoi ? Cela signifie qu'il y a des choses encore plus dangereuses ici ? C'est l'Enfer sur Terre !"

Il commença à réellement s'affoler à mesure qu'il comprenait où il était entré. Il savait que ce pensionnat abritait plus que des êtres humains normaux... Mais il ne s'attendait pas à ce que le danger soit si présent. Une lueur de peur apparut dans son regard et éclipsa tout le reste. Il se mordit la lèvre, fixant toujours le regard beaucoup trop jaune de la jeune femme.

Arthur se sentit stupidement fier de lui lorsque la chinoise commença à perdre patience. Cependant, elle n'avait pas tord en disant une telle chose. Il n'aurait jamais cru que de tout ce qu'il avait dit, ce qui l'avait énervée était un mot prononcé à la va-vite. Il ne l'avait jamais vraiment considéré comme un monstre, c'était comme ça qu'il appelait la grosse créature non-identifiée qui l'observait dans l'ombre.

Il s'apprêtait à l'accuser méchamment de ne rien comprendre et d'être susceptible quand il fut stoppé dans son élan par sa main et par ses mots chuchotés. Se faire ainsi dicter ses droits relança sa colère qui s'était vaguement apaisé. Mais avant de pouvoir faire quoi que ce soit, l'asiatique se changea en chaton noir, ses deux yeux éternellement jaunes luisant dans la semi-obscurité.

Il fut secrètement impressionné malgré lui par ce pouvoir à couper le souffle, mais pour rien au monde il ne l'aurait avoué. Il sursauta de stupeur lorsque le chaton, plutôt que de lui lacérer le visage, vint frotter sa tête contre sa jambe. Il ne put pas vraiment parler, partagé entre sa colère qui continuait à faire rage, sa souffrance de se faire rappeler si douloureusement l'absence de son 5eme sens, et l'attendrissement devant ce spectacle terriblement mignon.

Pour toute réaction, il détourna le visage, toujours incapable de trouver ses mots. Il remonta ses lunettes sur son nez d'un geste nerveux et fit mine d'être absolument captivé par la vue d'un tube de peinture à moitié vide.

Lorsqu'elle lui demanda ce qu'il était, il tourna la tête vers elle sans savoir quoi répondre. Une telle question signifiait qu'une personne sans pouvoir n'avait rien à faire ici, et il ne se qualifiait pas vraiment comme un super-héros doté de super-pouvoirs. Avant même qu'il ne puisse répondre, elle l'assaillit d'une nouvelle question.

"Moi c'est Ran Mao, et le tien ?"

Elle devait parler des prénoms. Il aurait dû s'attendre à un prénom asiatique, mais il fut tout de même surpris à cause de ses habitudes occidentales.

"Je m'appelle Arthur Kirkland, je... me suis un peu emporté... Euh... Pardon..."

Il la regarda s'asseoir sur un table, se sentant mal à l'aise. Elle sortit un paquet de gâteau.

"Je n'ai pas de.... Pouvoir. C'est plus un handicap, en fait... Si tu veux vraiment connaître les détails, je suis un cyborg..."

C'était la première fois qu'il prononçait ce mot à voix haute et ça lui fit comme un choc. Elle avait englouti plusieurs gâteaux pendant qu'il parlait. Elle tendit le paquet, lui en proposant un généreusement. Il inspira un grand coup avant de dire:

"Pardon, mais je ne sens plus le goût des aliments. Conserve plutôt ta nourriture."

Il lui accorda un sourire forcé, mettant ainsi fin à toute dispute. Il n'avait plus envie de s'énerver, il était déjà fatigué.

"Cyborg ? Qu'est-ce donc ?"

A cette question, plutôt que de longs discours, il sortit son téléphone, ouvrit une page internet et tapa "Cyborg" sur Wikipédia, puis lui tendit l'engin pour qu'elle le lise, en sa langue si elle le voulait. Après tout, il était un geek... On ne se refait pas. Son expression enfantine était adorable et il aurait rougi si il avait seulement possédé du sang, ce qui n'était hélas plus le cas.

Elle s'approcha et lui pinça les joues, mais il ne sentait absolument rien. Sa peau était comme un vêtement, quelque chose d'à peine lié à lui, une couverture qui ne protégeait rien et qui se déchirait comme du tissu au moindre objet coupant.

"Tu ressens rien ? Rien du tout ?"

"En effet. Je ne sens pas le contact de tes mains, ni du tissu sur ma peau, pas même du sol sous mes pieds. Pire encore, même le vent ne me laisse plus le sentir, et je me sens dans l'eau comme dans l'air."

Il serra les dents: si il avait pu, il aurait sans doute versé des larmes. Mais il n'en possédait plus. Il ajouta avec toute la douleur dont il était capable:

"C'est un supplice."

Il la regarda se courber pendant qu'elle s'excusait de son attitude de tout à l'heure. Arthur avait déjà tourné la page - il était habitué aux disputes.

"Je te présente mes excuses aussi."

"Ah, non, c'était ma faute. J'ai eu peur comme le gamin stupide que je suis, excuse-moi."

Ran Mao sourit adorablement pour la première fois depuis leur rencontre et le rassura:

"Les adultes aussi ont peur. Alors tu n'es pas stupide, Arthur."

"Merci" dit-il en souriant. Il ne souvenait pas d'avoir été aussi agréable avec quelqu'un d'autre auparavant, et c'était sans doute parce qu'elle ne se répandait pas en violence comme les autres hommes. Il s'était excusé et venait de la remercier, chose complètement inhabituelle pour lui. Il réfléchissais à celui tout en regardant Ran Mao l'embrasser sur la joue - baiser qu'il ne sentit bien sûr pas - puis poser son oreille contre son cœur. Il fut surpris qu'elle agisse ainsi mais ne dit rien.

"Comment es-tu en vie ? Tu n'as pas de cœur. Alors comment fais-tu pour vivre ?"

Il fut profondément offensé par cette remarque. Pas de cœur ? Il était pourtant certain d'en avoir un. Il se risqua à lui répondre, ne sachant pas si la douleur s'entendrait dans sa voix. Pas de cœur, hein ? C'était vrai en quelques sortes...

"J'ai un cœur... Fait de métal. Il suffit à me faire vivre, d'une manière peut-être un peu différente d'un ... vrai cœur. Il a suffisamment d'humanité pour que je puisse être blessé par des remarques maladroites."

Sans vouloir être désagréable, il lui donnait une chance de se rattraper. Il se tourna vers un tableau, décidé à changer de sujet, ne voulant pas monopoliser la discussion. C'est celui que Ran Mao venait juste de peindre.

"Tu as du talent !" lui assura-t-il.

"Essaye toi aussi !"

Arthur hésita quelques instants. Il aimait l'art et était très doué au dessin, mais n'avait jamais essayé la peinture. Il prit un pinceau, le plus gros qu'il trouva. Si il essayait, ce n'était pas seulement pour Ran Mao, mais pour sa propre curiosité. Était-il encore capable de créer ? Il regarda les couleurs qui se présentaient à lui.

"Je peux toujours essayer, mais laquelle prendre ?" demanda-t-il, surtout pour lui-même.

Il peignit toute la surface d'un noir d'encre, ce qui ne prit pas longtemps vu l'épaisseur de sa brosse. Puis il prit le pinceau le plus fin de l'atelier et le trempa dans un jaune vif. Pourquoi ? Parce qu'il lui rappelait les yeux de la jolie Ran Mao. Et dans ce noir ténébreux, il plaça des étoiles. Alors, il reposa le pinceau et dit d'un air maladroit:

"C'est tout."

Il lui sourit, redressant ses lunettes sous le coup de l'embarras, s'attendant à quelques habituels compliments polis capable de détendre l'ambiance. Il avait fait de son mieux pour être rapide, ne désirant pas rester au centre de l'intérêt.

"J'aimerais plutôt te regarder peindre, je suis mal à l'aise avec un pinceau...", s'excusa-t-il avec un sourire.

La remerciant à voix basse pour son compliment, Arthur observa Ran Mao s'installer face à un chevalet. Elle s'adressa à son modèle, pinceau en main, s'apprêtant à colorer la toile unie qui lui faisait face.

"Bouges pas !"

Il comprit aussitôt les desseins de la jeune chinoise et resta immobile. Après tout, ce n'était pas à un robot qu'on allait apprendre à ne pas bouger. Il était curieux de voir le résultat, car c'était bien entendu la première fois qu'on le représentait dans une œuvre - pourquoi l'auraient-ils fait après tout ? C'était un grincheux à lunettes, tout ce qu'il y a de plus laid à peindre.

Il resta immobile tout le temps de la peinture, et il dédiait cet exploit à l'art car il était sans doute l'individu le moins patient qu'on puisse trouver. Il trouvait le temps long, mais se dit qu'une œuvre n'en vaut la peine que si on lui accorde le temps qu'il lui faut, ni plus, ni moins. Ceci dit, si il devait considérer la personne nécéssitant le moins possible d'application à être représenté fidèlement, ça serait sans hésitation lui-même, à moins qu'elle ne s'amuse à représenter tous ses défauts. Il n'aima pas le sourire malicieux qu'elle esquissa mais préféra ne pas y porter plus d'attention, ne voulant pas se poser plus de questions.

"Voilà, ça te plait ?"

Elle tourna la toile vers lui et il y jeta un regard impatient. Ce qu'il y vit fut... Inattendu. Il resta quelques secondes perplexe avant de murmurer:

"Je suis... Un chat ?"

Malgré ce détail étrange, la peinture était belle, et on y retrouvait ce côté familier qu'on les anciennes œuvres de la Chine. Cependant, son visage avait tout ce qu'il y a d'occidental. Malgré ses efforts, la toile représentait quelqu'un d'impatient, et il se demanda si c'était un désir de Ran Mao ou s'il avait réellement eut l'air aussi tendu. Il donna son verdict final en souriant:

"J'aime beaucoup ! Tes peintures sont superbes, vraiment !", puis il ajouta en riant: "Mais pourquoi des oreilles de chat ?"

[HRP : Excuse moi il est très court, mais je n'avais d'inspi' et je n'ai pas mon ordi >_<]

[HRP: C'est pas très grave ^_^]

"Tant mieux alors. J'ai choisi un chat car tu as dis que tu les aimais bien. Et puis ce sont des animaux intelligents."

"C'est vrai qu'ils sont intelligents: je pense qu'ils le sont plus que certains humains. Mais ça reste un avis personnel."

Ran Mao descendit de la table et lui tendit la toile fraichement peinte.

"Tiens, je te la donne. Elle est à toi si tu veux bien."

Bien sûr, Arthur n'avait aucune envie de lui refuser sa peinture, mais qu'allait-il bien pouvoir en faire ? Il n'avait pas spécialement envie de se voir constamment, alors il ne comptait pas l'accrocher. Il ne pouvait pas la laisser ici non plus, là où tout le monde pourrait la voir: C'était assez personnel tout de même ! Alors où pouvait-il bien la ranger ? La mettre dans un placard ou sous son lit, quelque part où il l'oublierait ? C'était tout de même Ran Mao qui la lui avait peinte, c'était impoli de s'en débarrasser de cette manière. Alors que pouvait-il en faire ?

"Ah... Merci !", dit-il poliment en prenant la peinture.

Il réfléchissait à 100 à l'heure à ce qu'il pourrait bien en faire. Il regarda autour de lui comme si la solution était dans la pièce et se dit qu'il aurait tout le temps de s'en occuper plus tard, quand Ran Mao serait absente et ne risquait pas d'être blessée car c'était bien la dernière chose qu'il avait envie de faire. Mais quand même, sortir de cette salle encombré d'un tableau le représentant le mettait un peu mal à l'aise. Il fallait absolument qu'il soit le dernier d'eux deux à sortir et qu'il la recouvre d'un tissu. Si jamais quelqu'un le voyait dans cette situation... Et bien, il aurait l'humiliation de sa vie - enfin c'est ce qu'il pensait.

"Je suis un peu embarassé", finit-il par avouer. "Je ne sais pas... où je vais la mettre." Il jugea que "Je ne sais pas ce que je vais en faire" n'était pas très correct. Pas qu'il n'aimait pas la peinture, car il la trouvait très bien faite, mais qu'il n'aimait pas y être représenté.

"Où tu penses qu'il serait le mieux. Si c'est dans un endroit non visible ça ne fait rien. Il est à toi et donc toi seul doit décider où il ira."

Arthur acquiesça, bien que ces mots ne l'aidèrent pas le moins du monde. Il replongeait en pleine réflexion lorsque des pas se firent entendre depuis le couloir. Il était toujours convaincu que l'accès à cette salle n'était pas vraiment permis, et il confirma cette hypothèse lorsque Ran Mao lui indiqua de ne faire aucun bruit. Elle ne répondit pas à ses interrogations muettes, trop occupée à chercher un échappatoire. C'est alors qu'elle pointa la fenêtre en lui murmurant tout bas:

"Je vais devoir y aller. Pourrais-tu refermer la fenêtre une fois que je serai dehors ? Toi, il ne te diras rien, tu peux dire que tu étais en train de terminer un tableau, d'accord ?"

Il s'apprêtait à lui demander pourquoi elle s'enfuyait s'il était autorisé d'être ici, mais elle le prit de vitesse:

"Pourrais-je le prendre ? Il me plait vraiment."

Elle pointait le tableau qu'Arthur avait tenté de faire. Il acquiesça simplement et la regarda partir par la fenêtre qu'il referma derrière elle. Il se souviendrait de cette rencontre, de Ran Mao le petit chat qui s'enfuit par la fenêtre, au milieu des peintures multicolores. Il sursauta lorsque le professeur entra et balbutia quelques mots avant de s'en aller dans le couloir obscur, perdant un peu plus son chemin entre les murs de cet immense établissement. Finalement, il avait l'impression de s'y perdre soi-même.

[HRP: RP terminé *précision inutile, je sais*]